Haïti au bord de la guerre civile : une crise qui s’aggrave

La République d’Haïti, jadis perle des Caraïbes, se trouve aujourd’hui à un carrefour périlleux, confrontée à une crise multidimensionnelle qui menace de précipiter le pays dans les abysses d’une guerre civile.

Les alertes internationales se multiplient, et récemment, le président de la République Dominicaine, Luis Rodolfo Abinader Corona, a mis en garde contre le risque imminent d’une guerre civile en Haïti, mettant en lumière le chaos qui règne au sein du pays.

La situation en Haïti se détériore de jour en jour, avec des gangs armés qui imposent leur loi dans la capitale, Port-au-Prince, et au-delà, en particulier dans la région de l’Artibonite. Ces groupes criminels ne se contentent pas de contrôler des territoires mais se livrent à des affrontements violents, engendrant une recrudescence des enlèvements, des extorsions et des violences sexuelles. La police nationale haïtienne, débordée et insuffisamment équipée, peine à restaurer l’ordre et à garantir la sécurité des citoyens.

Face à cette escalade de la violence, le gouvernement haïtien a sollicité une intervention internationale, appelant à l’envoi d’une force d’assistance munie d’un mandat robuste pour appuyer les efforts de la police nationale. Malgré le soutien affiché de plusieurs pays, tels que le Canada, la France et les États-Unis, aucun État n’a pour l’instant pris la décision de mener cette force, laissant Haïti dans une attente incertaine et dangereuse.

L’avertissement du président dominicain souligne la portée régionale de la crise haïtienne, qui, si elle n’est pas contenue, pourrait déstabiliser toute la région des Caraïbes. Le Canada a d’ailleurs émis un avis de non-voyage pour Haïti, mettant en avant les risques liés aux enlèvements et à la violence des gangs, et conseille à ses ressortissants sur place de quitter le pays par des moyens commerciaux si possible.

La crise haïtienne, aux racines profondes et complexes, est alimentée par une crise politique persistante, une violence endémique, et l’influence parfois contestée de la communauté internationale, sans oublier les graves problèmes économiques et humanitaires que connaît le pays. La combinaison de ces facteurs crée un terreau fertile pour une instabilité accrue, voire une guerre civile.

Les gangs, au cœur de cette tourmente, ont su tirer parti de l’instabilité politique, notamment suite à l’assassinat du président Jovenel Moïse en 2021 et l’absence d’élections fonctionnelles. Leur pouvoir s’est accru, s’appuyant sur une économie de la violence et exploitant le vide laissé par un État affaibli par des catastrophes naturelles, la pandémie de COVID-19, et des conditions économiques précaires.

Ces groupes criminels, organisés de manière sophistiquée, exercent un contrôle territorial strict, notamment dans les quartiers pauvres et les bidonvilles de Port-au-Prince. Ils opèrent avec une structure hiérarchique, menant des activités illégales diverses pour financer leur emprise sur le territoire. La sophistication de leurs opérations et leur autonomie financière rendent la tâche de les contrer encore plus ardue pour les autorités haïtiennes.

Les Relations Haïti-France

Les liens entre Haïti et la France, empreints d’une histoire riche et complexe, ont toujours été marqués par des hauts et des bas, reflétant les évolutions politiques, économiques et sociales des deux nations. Aujourd’hui, ces relations se manifestent principalement à travers les échanges commerciaux et la coopération culturelle, bien que l’ombre de leur passé commun continue d’influencer leurs interactions.


En 2022, le commerce bilatéral entre Haïti et la France a connu une baisse pour la quatrième année consécutive, s’établissant à 53,5 millions d’euros. Cette diminution s’explique par une réduction des exportations françaises vers Haïti, tandis que les importations en provenance d’Haïti vers la France ont vu une légère augmentation. Cette tendance traduit les répercussions de la crise multidimensionnelle que connaît Haïti, touchant à la fois les plans politique, économique, sécuritaire et sanitaire, et impactant directement l’activité des entreprises haïtiennes.

Les défis auxquels fait face Haïti ne sont pas sans conséquences sur ses relations commerciales et diplomatiques avec la France. La crise politique haïtienne, en particulier, exerce une pression constante sur ces échanges, limitant les opportunités de commerce et d’investissement entre les deux pays. Néanmoins, malgré ces obstacles, les relations franco-haïtiennes demeurent marquées par des initiatives de coopération et un intérêt mutuel pour renforcer les liens économiques et culturels.

Le rapport sur les relations bilatérales entre Haïti et la France, publié par le Trésor français, offre un aperçu détaillé de ces échanges et souligne les domaines potentiels pour une coopération future. Il met en évidence l’importance de travailler conjointement sur des projets de développement, d’éducation et de renforcement institutionnel, dans le but de soutenir Haïti dans sa quête de stabilité et de progrès.

La crise en Haïti exige une réponse internationale urgente et coordonnée pour prévenir une escalade vers une guerre civile, qui aurait des conséquences désastreuses non seulement pour Haïti mais pour toute la région des Caraïbes. La communauté internationale doit agir de manière décisive pour soutenir Haïti dans ces moments critiques, afin de restaurer l’ordre et de poser les jalons d’une paix durable.

Jean-Yves FRIXON

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